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Charles Baudelaire, L’Étranger

19.11.2018

Aus: Le Spleen de Paris (Petits Poèmes en Prose)

— Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis ? ton père, ta mère, ta sœur ou ton frère ?

— Je n’ai ni père, ni mère, ni sœur, ni frère.

— Tes amis ?

— Vous vous servez là d’une parole dont le sens m’est resté jusqu’à ce jour inconnu.

— Ta patrie ?

— J’ignore sous quelle latitude elle est située.

— La beauté ?

— Je l’aimerais volontiers, déesse et immortelle.

— L’or ?

— Je le hais comme vous haïssez Dieu.

— Eh ! qu’aimes-tu donc, extraordinaire étranger ?

— J’aime les nuages… les nuages qui passent… là-bas… les merveilleux nuages !

 

Der Fremde

„Wen liebst du am meisten, rätselhafter Mann, sag? Deinen Vater, deine Mutter, deine Schwester oder deinen Bruder?“

„Hab Vater nicht noch Mutter, weder Schwester noch Bruder.“

„Deine Freunde?“

„Du sagst da ein Wort, dessen Sinn mir zeitlebens nicht aufging.“

„Dein Heimatland?“

„Auf welchem Breitengrade das liegt, weiß ich nicht.“

„Die Schönheit?“

„Ich liebte sie wohl sehr, wär Göttin sie und ohne Tod.“

„Das Gold?“

„Ich hasse es, wie du Gott hassest.“

„Was liebst du denn nun, seltsamer Fremdling?“

„Die Wolken liebe ich … die Wolken, die dahinziehen … dahin … die wunderbaren Wolken!“

 

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