Skip to content

Charles Baudelaire, Le mauvais vitrier

21.11.2018

Aus: Le Spleen de Paris (Petits Poèmes en Prose)

Il y a des natures purement contemplatives et tout à fait impropres à l’action, qui cependant, sous une impulsion mystérieuse et inconnue, agissent quelquefois avec une rapidité dont elles se seraient crues elles-mêmes incapables.

Tel qui, craignant de trouver chez son concierge une nouvelle chagrinante, rôde lâchement une heure devant sa porte sans oser rentrer, tel qui garde quinze jours une lettre sans la décacheter, ou ne se résigne qu’au bout de six mois à opérer une démarche nécessaire depuis un an, se sentent quelquefois brusquement précipités vers l’action par une force irrésistible, comme la flèche d’un arc. Le moraliste et le médecin, qui prétendent tout savoir, ne peuvent pas expliquer d’où vient si subitement une si folle énergie à ces âmes paresseuses et voluptueuses, et comment, incapables d’accomplir les choses les plus simples et les plus nécessaires, elles trouvent à une certaine minute un courage de luxe pour exécuter les actes les plus absurdes et souvent même les plus dangereux.

Un de mes amis, le plus inoffensif rêveur qui ait existé, a mis une fois le feu à une forêt pour voir, disait-il, si le feu prenait avec autant de facilité qu’on l’affirme généralement. Dix fois de suite, l’expérience manqua ; mais, à la onzième, elle réussit beaucoup trop bien.

Un autre allumera un cigare à côté d’un tonneau de poudre, pour voir, pour savoir, pour tenter la destinée, pour se contraindre lui-même à faire preuve d’énergie, pour faire le joueur, pour connaître les plaisirs de l’anxiété, pour rien, par caprice, par désœuvrement.

C’est une espèce d’énergie qui jaillit de l’ennui et de la rêverie ; et ceux en qui elle se manifeste si inopinément sont, en général, comme je l’ai dit, les plus indolents et les plus rêveurs des êtres.

Un autre, timide à ce point qu’il baisse les yeux même devant les regards des hommes, à ce point qu’il lui faut rassembler toute sa pauvre volonté pour entrer dans un café ou passer devant le bureau d’un théâtre, où les contrôleurs lui paraissent investis de la majesté de Minos, d’Éaque et de Rhadamanthe, sautera brusquement au cou d’un vieillard qui passe à côté de lui et l’embrassera avec enthousiasme devant la foule étonnée.

— Pourquoi ? Parce que… parce que cette physionomie lui était irrésistiblement sympathique ? Peut-être ; mais il est plus légitime de supposer que lui-même il ne sait pas pourquoi.

J’ai été plus d’une fois victime de ces crises et de ces élans, qui nous autorisent à croire que des Démons malicieux se glissent en nous et nous font accomplir, à notre insu, leurs plus absurdes volontés.

Un matin je m’étais levé maussade, triste, fatigué d’oisiveté, et poussé, me semblait-il, à faire quelque chose de grand, une action d’éclat ; et j’ouvris la fenêtre, hélas !

(Observez, je vous prie, que l’esprit de mystification qui, chez quelques personnes, n’est pas le résultat d’un travail ou d’une combinaison, mais d’une inspiration fortuite, participe beaucoup, ne fût-ce que par l’ardeur du désir, de cette humeur, hystérique selon les médecins, satanique selon ceux qui pensent un peu mieux que les médecins, qui nous pousse sans résistance vers une foule d’actions dangereuses ou inconvenantes.)

La première personne que j’aperçus dans la rue, ce fut un vitrier dont le cri perçant, discordant, monta jusqu’à moi à travers la lourde et sale atmosphère parisienne. Il me serait d’ailleurs impossible de dire pourquoi je fus pris à l’égard de ce pauvre homme d’une haine aussi soudaine que despotique.

« — Hé ! hé ! » et je lui criai de monter. Cependant je réfléchissais, non sans quelque gaieté, que, la chambre étant au sixième étage et l’escalier fort étroit, l’homme devait éprouver quelque peine à opérer son ascension et accrocher en maint endroit les angles de sa fragile marchandise.

Enfin il parut : j’examinai curieusement toutes ses vitres, et je lui dis : « — Comment ? vous n’avez pas de verres de couleur ? des verres roses, rouges, bleus, des vitres magiques, des vitres de paradis ? Impudent que vous êtes ! vous osez vous promener dans des quartiers pauvres, et vous n’avez pas même de vitres qui fassent voir la vie en beau ! » Et je le poussai vivement vers l’escalier, où il trébucha en grognant.

Je m’approchai du balcon et je me saisis d’un petit pot de fleurs, et quand l’homme reparut au débouché de la porte, je laissai tomber perpendiculairement mon engin de guerre sur le rebord postérieur de ses crochets ; et le choc le renversant, il acheva de briser sous son dos toute sa pauvre fortune ambulatoire qui rendit le bruit éclatant d’un palais de cristal crevé par la foudre.

Et, ivre de ma folie, je lui criai furieusement : « La vie en beau ! la vie en beau ! »

Ces plaisanteries nerveuses ne sont pas sans péril, et on peut souvent les payer cher. Mais qu’importe l’éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l’infini de la jouissance?

 

Der stümperhafte Glaser

Es gibt rein kontemplative Charaktere, die zur Tat gänzlich ungeeignet sind und die doch unter einem geheimnisvollen und unbekannten Antrieb bisweilen mit einer Schnelligkeit zur Tat schreiten, die sie sich selbst nicht zugetraut hätten.

Solch ein Mensch, der in der Befürchtung, eine betrübliche Nachricht bei seinem Pförtner vorzufinden, eine geschlagene Stunde feige vor der Haustüre herumtrödelt, so einer, der einen Brief fünfzehn Tage ungeöffnet in der Schublade liegen läßt oder der sich erst nach sechs Monaten zu einem wichtigen Behördengang durchringt, der schon seit einem Jahr ansteht, sie stürzen sich bisweilen wie der Pfeil eines Bogens, von einer unwiderstehlichen Macht gestoßen, kopfüber ins kalte Wasser einer Tat. Der Moralist und der Mediziner, die alles zu wissen vorgeben, können nicht erklären, woraus der Trägheit und dem Wohlleben verfallene Seelen mit einemal eine solche irrwitzige Energie schöpfen und wieso sie, unfähig, die alltäglichsten und notwendigsten Dinge hinzubekommen, in einem bestimmten Augenblick einen Überschuß an Mut aufbringen, um ganz unglaubliche und oft sogar äußerst gefährliche Taten auszuführen.

Einer meiner Freunde, ein ganz und gar harmloser Träumer, hat einmal in einem Waldstück gezündelt, um, wie er sagte, zu sehen, ob das Feuer so leicht um sich greife, wie man allgemein behauptet. Zehnmal hintereinander scheiterte der Versuch, doch beim elften Mal war er nur allzu erfolgreich.

Ein anderer entzündete neben einem Pulverfaß eine Zigarre, um zu sehen, zu wissen, um das Schicksal zu versuchen, um sich auf Teufel komm raus seine Tatkraft unter Beweis zu stellen, um den Hasardeur zu mimen, um die Wonnen der Angst zu kosten, für nichts, aus einer Laune heraus, aus Schlendrian.

Dies ist eine Form der Willensstärke, die der Langeweile und der Traumseligkeit entspringt; und jene, an denen sie sich so unerwartet zeigt, sind, wie ich schon sagte, die trägsten und träumerischsten Naturen.

Ein anderer, schüchtern in einem Maße, daß er den Blick sogar vor den Passanten senkt, in dem Maße, daß er seinen ganzen armseligen Mut zusammenraffen muß, um in ein Café einzutreten oder am Dienstzimmer eines Theaters vorüberzugehen, dessen Kontrolleure ihm die majestätische Aura eines Minos, Ajakos und Rhadamanthys auszustrahlen scheinen, fällt plötzlich einem Greis, der an ihm vorbeistrich, um den Hals und umarmt ihn überschwänglich vor der verblüften Menge.

Weshalb? Weil … weil ihm sein Gesicht unwiderstehlich sympathisch war? Vielleicht. Aber plausibler ist die Annahme, daß er es selbst nicht weiß.

Ich war mehr als einmal Opfer jener Anfälle und Anflüge, die uns das Zeugnis in die Hand drücken, wonach bösartige Dämonen sich in uns einschleichen und uns gegen unseren Willen ihre widersinnigsten Absichten vollführen lassen.

Eines Morgens erhob ich mich mißmutig, trist, ausgelaugt vom Müßiggang, mit dem Antrieb, wie mir schien, etwas Außerordentliches auf die Beine zu stellen, etwas Spektakuläres; und ich machte, leider, das Fenster auf!

(Achten Sie bitte einmal darauf, daß der Geist der Mystifikation, der bei einigen nicht das Ergebnis gedanklicher Anstrengung oder Kombinationskunst, sondern einer zufälligen Eingebung darstellt, in hohem Maße, wenn nicht an der Glut der Begierde, an jener Stimmung teilhat, die von den Medizinern Hysterie, satanische Besessenheit aber von jenen genannt wird, die etwas tiefer dringen als die Ärzte, dieser Geist uns widerstandslos zu einer Unmenge von gefährlichen und unschicklichen Taten antreibt.)

Der erste Mensch, den ich auf der Straße bemerkte, war ein Glaser, dessen durchdringender, schriller Ruf durch die drückende und schmutzige Luft von Paris an mein Ohr drang. Ich könnte beim besten Willen nicht sagen, weshalb mich angesichts dieses armseligen Kerls ein solch unerwarteter und despotischer Haß ergriff.

„Heda, he!“, rief ich ihn herbei. Wobei ich nicht ohne ein gewisses Vergnügen daran dachte, wie der Mann, lag mein Zimmer doch im sechsten Stock und die Treppe war schmal, nur mit Mühe den Aufstieg bewältigen könnte und an etlichen Winkeln die Ecken seiner zerbrechlichen Ware verkanten müßte.

Endlich tauchte er auf. Ich begutachtete mit Interesse seine Gläser und sagte zu ihm: „Was, sie haben keine farbigen Gläser, rosa, rote, blaue Gläser, Zaubergläser, Paradiesesgläser? Sie unverschämter Mensch, Sie wagen es, durch die Armenviertel zu gehen, und haben nicht einmal Gläser, durch die man das Leben in Schönheit schauen kann?“ Und ich stieß ihn kräftig in Richtung Treppe, wo er murrend stolperte.

Ich ging zum Balkon und ergriff einen Blumentopf, und als der Mann am Toreingang erschien, ließ ich meine Rakete senkrecht auf den hinteren Rand seiner Halterung fallen. Vor Schreck stürzte er zu Boden und zerbrach auf seinem Rücken das dünne Vermögen seiner Wanderschaft, das mit einem Geklirr auseinanderstob, als habe der Blitz einen Palast aus Kristall zum Bersten gebracht.

Diese hysterischen Späße sind nicht ohne Gefahr, und oft kann man sie teuer bezahlen. Doch was schert den die Ewigkeit der Verdammnis, der für eine Sekunde die Unendlichkeit der Wonne gekostet hat?

 

Comments are closed.

Top